Des nouvelles du futur #2
Dans cette revue de presse : de nouvelles illustrations des applications de l’IA dans le domaine des arts, le progrès technologique jusque dans vos toilettes, du nouveau sur la prévention des crimes, sur les projets spatiaux de Jeff Bezos et sur la « techplomatie » européenne.
ART & IA – Je partageais dans ce billet quelques réflexions sur le devenir de l’art à l’heure de l’intelligence artificielle. Pour ceux que le sujet intéresse, en voici quelques récentes illustrations :
Dans un article daté du 23 août, le site Futurism relate qu’un grand label de musique, Capitol Records, a « engagé » une intelligence artificielle comme artiste de rap. L’IA, baptisée FN Meka, compte déjà plus de dix millions d’abonnés sur TikTok. Ses développeurs se targuent de pouvoir désormais créer des artistes sur mesure, à partir d’éléments qui ont fait leurs preuves. La nouvelle a suscité des réactions assez froides… Au point que, dès le lendemain, un nouvel article annonce que FN Meka a été congédié par Capitol Records. Ce rebondissement semble cependant avoir été motivé par le fait que FN Meka (personnifié par un avatar noir) soit apparu comme une caricature raciste, davantage que par des considérations éthiques ou philosophiques sur l’art et le statut d’artiste de manière plus large. Un FN Meka plus politiquement correct aurait-il donc pu continuer sa lucrative « carrière » ? L’avenir nous le dira sans doute…
Quittons la musique pour le cinéma : Futurism nous apprend également qu’un entrepreneur allemand travaille à un film entièrement conçu au moyen de l’IA – des images aux sons, en passant par les voix des « acteurs » – à partir d’instructions textuelles. La bande-annonce ne m’a pas franchement paru à la hauteur des chefs d’œuvre du 7ème art, mais l’idée qu’a l’entrepreneur de permettre à chacun de créer ses propres scènes va dans le sens de ce que j’écrivais dans mon précédent billet sur le risque d’une individualisation de l’art…
Enfin, toujours et encore selon Futurism, un tableau créé par une IA a remporté le premier prix au concours des beaux-arts de l’État du Colorado. Évidemment, cette victoire n’a pas plu aux autres artistes en lice… L’homme qui a utilisé l’IA pour créer sa toile s’est défendu en expliquant qu’il lui avait fallu plusieurs semaines de labeur pour définir l’instruction permettant à l’IA de générer son chef d’œuvre. Une fois encore, la question est donc de savoir qui est vraiment l’artiste dans cette histoire…
Terminons sur ce sujet par une note qui rassurera peut-être les artistes : contrairement aux affirmations tonitruantes d’un ancien ingénieur de Google, l’IA n’est pas (ou pas encore) pourvue d’une véritable conscience. La croyance inverse semble procéder d’une forme d’anthropomorphisme davantage que d’une quelconque réalité scientifique. En clair : si vos conversations avec Siri ou Alexa vous portent à croire que ces assistants vocaux sont des êtres conscients et sensibles, il y a des chances que vous soyez simplement victime de l’effet ELIZA.
TOILETTES – Le progrès technique n’a décidément aucune limite : même la porte des cabinets ne l’arrête pas, pour le meilleur et pour le pire…
Commençons par le pire : une start-up américaine joliment baptisée Throne Labs propose d’exiger des usagers de toilettes publiques qu’ils scannent un code QR avant de pouvoir s’installer sur le trône de céramique. Tant pis pour les usagers dépourvus de téléphone au moment le plus pressant : l’objectif est d’identifier les malotrus qui oublieraient de tirer la chasse ou feraient des guirlandes de papier toilette, afin de pouvoir ensuite les bannir de ces lieux d’aisance… Votre score de propreté apparaîtra peut-être bientôt aux côtés de votre note Uber ou du nombre de vos abonnés sur Twitter, illustrant jusqu’à la caricature la « société du jugement perpétuel » dont je parlais ici.
Le meilleur, sur une note beaucoup plus sérieuse, est peut-être l’invention par Samsung et la Fondation Bill et Melinda Gates de toilettes qui purifient l’urine et brûlent les déjections. Selon l’ONU, près de la moitié de l’humanité n’a pas accès à des services d’assainissement fiables, et plus de sept cents enfants de moins de cinq ans meurent chaque jour des conséquences de ce problème. À condition qu’elle soit effectivement installée là où les besoins s’en font sentir – sans mauvais jeu de mot –, cette innovation pourrait donc être une solution bienvenue.
PRÉVENTION DES CRIMES – On a beaucoup parlé au cours des dernières années des biais de la « police prédictive », laquelle semblait surtout entretenir certains stéréotypes racistes… Comme le rapporte cet article de BBC Science Focus, un nouveau modèle d’algorithme développé par un professeur de l’Université de Chicago pourrait éviter ces travers en se contentant d’analyser les registres d’événements criminels pour prévoir quel type de crime pourrait survenir à quel endroit et à quel moment, sans chercher à prédire le profil des personnes susceptibles de commettre de tels actes, et en réduisant l’intervention humaine dans le traitement des données utilisées.
ESPACE – Selon cet article de Siècle Digital, le projet de station spatiale de Blue Origin (une entreprise appartenant à Jeff Bezos) a reçu le feu vert de la NASA pour avancer vers sa phase de design. C’est un pas de plus vers une très relative démocratisation (ou, diront certains, vers une absolue commercialisation) de l’espace, la station ayant vocation à accueillir notamment des touristes ou des tournages de films.
“TECHPLOMATIE” – Alors qu’elle travaille à un ensemble très ambitieux de réglementations concernant les grandes plateformes numériques (Digital Markets Act, Digital Services Act), qui ont d’ailleurs donné lieu à d’intenses efforts de lobbying de la part de ces dernières, l’Union européenne a récemment ouvert à San Francisco un bureau de représentation auprès de la Silicon Valley. Une preuve de plus, si besoin était, que les GAFAM sont devenus des acteurs dont l’importance géopolitique n’a rien à envier à certains États…
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